“Jonum” : ce sigle ne vous évoque peut-être pas grand chose pour le moment, mais vous risquez d’en entendre beaucoup parler ces prochains mois, suite au projet de loi dit SREN (sécuriser et réguler l’espace numérique) dont l’un des volets porte sur l’encadrement des jeux numériques fondés sur les technologies du Web 3.0. Quelles en seront les conséquences pour les casinos en ligne en France ? Voici quelques éléments de réponse.
La loi SREN et les Jonum : de quoi parle-t-on ?
Le projet de loi SREN émane du Ministre de l’Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique M. Bruno Le Maire et du ministre délégué chargé des affaires numériques M. Jean-Noël Barrot. Présenté au Conseil des Ministres le 10 mai 2023 et adopté en première lecture au Sénat le 5 juillet dernier, il a également été adopté en première lecture par l’Assemblée nationale le 17 octobre dernier.
Ce projet de loi porte sur plusieurs volets, à savoir la protection des enfants contre la pornographie en ligne, la protection contre le harcèlement, les arnaques et la désinformation en ligne, l’adaptation du droit français aux textes européens cadres sur les services et marchés numériques (DSA et DMA), ou encore l’encadrement des jeux à objets numériques monétisables, également appelés Jonum.
Mais qu’est-ce que cela implique pour l’industrie des jeux d’argent en ligne ? Somme toute, nous sommes encore loin de la légalisation totale des meilleurs casinos en ligne de France. Certes, l’ensemble des sites de jeux agréés par l’Autorité Nationale des Jeux (ANJ) figure dans cette liste, mais les autres casinos en ligne qui y sont mentionnés se démarquent également pour leur qualité et leurs services optimaux, d’après les critères d’évaluation mis en place par ces sites pour rediriger leurs lecteurs uniquement vers les opérateurs de jeux de confiance.
Ces casinos en ligne, pour l’heure non autorisés par l’ANJ, pourraient bien finir par devenir 100 % légaux en France, mais cela ne sera possible que sous un certain nombre de conditions. En effet, le projet de loi SREN prévoit la mise en place d’un cadre expérimental de trois ans durant lequel les Jonum seront rigoureusement définis, dans l’optique de pouvoir déclarer les entreprises qui les opèrent à l’ANJ, tout comme c’est déjà le cas pour les sites de paris sportifs et de lotos agréés.
Parmi les autres amendements apportés au projet de loi et qui concernent les sites de jeux d’argent, les décideurs souhaitent notamment mettre en place de meilleurs mécanismes de vérification de l’âge, pour que les personnes mineures n’y aient pas accès de façon prématurée. De plus, l’information des joueurs sur les risques d’addiction devra être accrue sur ces sites, et les récompenses qui y seront distribuées devront être plafonnées.
Quelles répercussions pour les casinos en ligne ?
Les répercussions ne sont pas encore tout à fait claires pour les casinos en ligne, qui opèrent depuis parfois plus de 10 ans sans être réellement légaux en France. En effet, l’enjeu pour ces sites réside dans les contours de la définition des Jonum que la loi SREN va dessiner. En vertu de la définition apportée par l’amendement du Sénat du 5 juillet 2023, cette loi souhaite avant tout réguler la circulation des NFT et des cryptomonnaies via les jeux d’argent, et notamment les jeux crypto.
Par conséquent, le secteur des casinos physiques s’inquiète d’y voir une porte ouverte à la légalisation de tous les casinos en ligne, pourvu qu’ils distribuent des gains en crypto. L’inquiétude et la colère des casinos terrestres sont d’autant plus grandes qu’ils voient leur place sur le marché fortement menacée par l’arrivée massive de nouveaux acteurs toujours plus nombreux. Certes, l’agrément par l’ANJ a de grandes chances de servir de garde-fou, mais cela reste une porte grand ouverte pour l’industrie des jeux de casino en ligne.
Et du côté des spécialistes des addictions ?
Le constat n’est pas beaucoup plus rose du côté des professionnels de santé, qui soulignent un risque accru de troubles addictifs aux jeux d’argent. La Fédération Addiction, qui est un collectif d’associations et de professionnels de l’addictologie, voit dans la loi SREN une malheureuse libéralisation complète du marché des jeux d’argent en ligne, pourvu que les casinos en ligne, au lieu de proposer leurs gains en euros, le fassent plutôt en crypto.
La Fédération soulève d’ores et déjà dans leur communiqué la zone grise dans laquelle se trouvent les jeux d’argent en ligne depuis de nombreuses années, exprimant le manque de contrôle apporté par l’ANJ sur ces sites.
Dans tous les cas, si une telle loi venait à être définitivement adoptée, un focus devra être fait sur la promotion de conduites de jeu responsable et sur l’encadrement des pratiques de publicité et de sponsoring. En effet, les sites de jeux d’argent n’hésitent pas à s’entourer de clubs ou d’organisations sportives pour légitimer leur existence. Pour ne pas que ces partenariats donnent envie aux plus fragiles de jouer sans compter, l’industrie des casinos en ligne a tout intérêt à redoubler d’efforts pour promouvoir le jeu responsable.